Un départ reporté en raison d’une météo dantesque, une première nuit en mer sauvage, une traversée de la Manche expresse, un long bord vers l’ouest face à une mer déchaînée, une nouvelle dépression pluvio-orageuse au nord des Açores…

La 10e édition de la Transat Jacques Vabre avait débuté sur les chapeaux de roues dans des conditions sportives, voire violentes. Bernard Stamm et Jean-François Cuzon avaient parfaitement géré cette entame costaude du parcours qui devait les mener du Havre au Costa Rica, s’offrant même un temps le leadership de la course avant la nuit du 6 au 7 novembre.

Nuit durant laquelle le duo de Cheminées Poujoulat a découvert avec stupeur une importante voie d’eau sur le côté tribord de sa monture. Retour, jour par jour, sur cette avarie majeure, de la collision avec un OFNI (objet flottant non identifié) aux premières expertises menées sur le bateau, en passant l’ensemble des opérations intermédiaires réalisées avec un professionnalisme et un sens marin hors normes.

6 novembre :

Le vent souffle autour de 30 nœuds, Cheminées Poujoulat file sous trinquette et un ris dans la grand-voile à 15-16 nœuds au reaching, à 130 milles dans le nord des Açores. Bernard Stamm et Jean-François Cuzon s’apprêtent à réduire la toile en envoyant l’ORC. Au moment où Bernard rentre dans son bateau avant la manœuvre, il remarque de l’eau dans la coque. Beaucoup. Immédiatement, la trinquette est roulée, le monocoque arrêté. Le constat est clair et sans appel : une voie d’eau est parfaitement visible à l’avant de la cadène de hauban sur le côté tribord. Très vite, avec Jeff, il met tout en œuvre pour sécuriser le 60 pieds. A 23h30, il avise la Direction de course de l’avarie.

7 novembre :

Dans un premier temps, Bernard et Jeff envisagent un remorquage jusqu’à l’archipel des Açores mais des conditions exécrables – 45 nœuds de vent et une mer très formée – rendent impossible une telle opération avant au moins cinq jours. Un délai trop long pour Cheminées Poujoulat, qui, malmené par les éléments, pourrait rapidement devenir dangereux pour ses deux skippers. Dès lors, à 10h20, en accord avec Jean Maurel, le Directeur de course, la balise de détresse du bateau est déclenchée. Instantanément, le signal est reçu par le Cross Gris Nez puis relayé au MRCC de Punta Delgada, sur l’île de San Miguel. Les secours sont officiellement lancés. Un hélicoptère est envoyé sur zone. Guidé par la balise SARSAT de Cheminées Poujoulat capable de fournir des positions toutes les demi-heures, il rejoint le monocoque endommagé en moins de deux heures. L’opération d’hélitreuillage débute dans la foulée. Avec succès.

8 novembre :

Aux Açores, le team de Cheminées Poujoulat actionne un important réseau pour monter l’opération de remorquage du monocoque en lien avec l’équipe basée à Brest.

9 novembre : Avec l’aide de Gautier Levisse, boat captain, et d’Armando, responsable de la marina d’Horta, Bernard Stamm parvient à trouver un bateau qui devrait leur permettre de remorquer Cheminées Poujoulat jusqu’aux Açores. C’est donc à bord d’un bateau de pêche de 13,50 mètres dont le patron, Jorge, a déjà participé à ce type d’opération, que le skipper suisse et Gautier embarquent dans l’après-midi pour rejoindre la zone où se situe le monocoque endommagé.

10 novembre :

Aux alentours de 9 heures, heure française, la balise Argos permettant de localiser Cheminées Poujoulat cesse d’émettre et ainsi de donner des positions GPS à Bernard Stamm et Gautier Levisse. C’est donc à l’aide d’un calcul de triangulation rendu possible grâce au signal Iridium, moins précis, que les deux hommes guident le capitaine du chalutier Açorien. En fin de journée, ils le découvrent flottant entre deux eaux. Seul l’avant est visible. L’opération de remorquage débute.

11 novembre :

Le poids du bateau rend difficile la lente progression du chalutier vers les Açores. La prudence est de rigueur.

12 novembre :

Au petit matin, après 38 heures de remorquage, Cheminées Poujoulat arrive à Terceira où il amarré au port militaire.

14 novembre :

Après 48 heures passées dans le port militaire entre deux eaux, le monocoque de Bernard Stamm est transféré vers le port de commerce où l’attendent les pompiers équipés de pompes surpuissantes. Une fois vidé, Cheminées Poujoulat est inspecté par son équipe technique puis démâté.

15 novembre :

Gruté et mis au sec sur le terre-plein du port de Terceira sur un ber improvisé composé de containers et de sacs remplis de voiles endommagées puis de billes de polystyrène, le bateau est passé au crible par Bernard et les équipes du cabinet d’architecte Kouyoumdjian Design et du chantier Décision SA. Les experts sont formels, la destruction du bordé est liée à un choc avec un OFNI (objet flottant non identifié).

16 novembre :

Le point d’impact est analysé et permet de comprendre le mécanisme de rupture du bordé. Dès lors, il s’agit de définir avec précision les zones abimées. C’est ainsi que débutent les contrôles du bordé aux ultra-sons.

17 novembre :

Le bateau a souffert à différents endroits : intérieur, roof, arrière… De fait, les vagues ont tout pilonné. Chaque point est recensé par Bernard et son équipe. Dans le même temps, au chantier Décision SA, la réparation de Cheminées Poujoulat est lancée. Un bout du moule du bateau va être découpé afin de permettre la construction d’un morceau de bordé. Celui-ci sera aussi vite que possible expédié à Brest pour être mis en place sur le 60 pieds.

22 novembre

Le cargo sur lequel le bateau de Bernard Stamm sera chargé demain pour rejoindre la France arrive à Terceira. Il lui faudra cinq jours pour rallier Brest, port d’attache de Cheminées Poujoulat, où débuteront les travaux dès la fin du mois. Pas de temps à perdre, et pour cause, le planning de l’année 2012 est chargé : le Tour de l’Europe en mai, les Tonnerres de Brest en juillet et, bien évidemment, le Vendée Globe en novembre.

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